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Les membres de la Confederación de Trabajadores Municipales de la República de Argentina (CTM), affiliée à l’ISP, se sont mobilisés tout au long de l’année 2016, ainsi qu’en 2017, pour demander aux « Intendentes » (maires) argentins d’appliquer la loi provinciale 14.656 de 2015 sur les relations de travail et la négociation collective pour les employé(e)s municipaux de la province de Buenos Aires, communément appelée « loi paritaire ».
Cette loi a remplacé la loi 11.757 qui permettait aux autorités locales de la province de Buenos Airesde définir unilatéralement les conditions de travail et de salaire des employé(e)s des collectivités locales, et que la Cour suprême de justice de la province a jugée anticonstitutionnelle.
Rubén García, le Secrétaire général de la Fe.Si.Mu.Bo et de la CTM s’adresse aux employé(e)s municipaux dans le cadre de la mobilisation contre le décret 784/2016 qui entend limiter la portée de la loi 14656 relative à la négociation collective dans la province de Buenos Aires. Août 2016. |
La loi paritaire constitue une avancée importante du mouvement syndical des collectivités locales et régionales/municipales et du secteur public argentin, dans la mesure où elle reconnaît les droits de négociation collective des travailleurs/euses du secteur municipal de la province de Buenos Aires (la plus étendue et la plus peuplée du pays), et où elle ordonne des négociations bilatérales pour définir les conditions de travail et de salaire des employé(e)s municipaux. Elle prévoit en outre des dispositions concernant le temps de travail, le salaire décent, les congés payés en cas de violence domestique ; elle institue un fonds provincial pour garantir la rémunération des travailleurs/euses en cas de faillite des finances municipales, et elle fixe un plafond maximum (20% du total des effectifs sur cinq ans) pour limiter l’externalisation des travailleurs/euses.
Cependant, en Argentine, au niveau municipal, la négociation collective réglementée par le droit collectif du travail n’existe pas dans la plupart des 2189 municipalités du pays et elle est partiellement et formellement instituée dans 44 municipalités seulement sur les 135 que compte la province de Buenos Aires, où la loi paritaire est appliquée. Le Secrétaire général de la CTM, Rubén « Cholo » García – également Secrétaire général de la Federación de sindicatos Municipales Bonaerenses (Fe.Si.Mu.Bo) qui regroupe les syndicats des employé(e)s municipaux de la province de Buenos Aires –, a déclaré, en faisant allusion à l’attitude négative des maires vis-à-vis de l’ouverture de négociations pour mettre en œuvre la loi paritaire :
« Jusqu’à présent, il y a un peu plus de 40 municipalités qui ont signé les conventions collectives, et nous avons constaté qu’il ne s’agit pas d’une question de couleur politique des autorités. Le problème, c’est que les maires, indépendamment de leur ville d’origine, ne veulent pas s’asseoir à la table des négociations pour discuter d’égal à égal avec les employé(e)s municipaux ».
Suite à la grève générale d’avril 2017, à l’initiative de la Confederación General del Trabajo de la República Argentina(CGT) et à laquelle s’est jointe la CTM, les différentes fédérations provinciales de la CTM et leurs syndicats locaux continuent d’adopter plusieurs tactiques de lutte, qu’il s’agisse d’arrêts de travail suivis de mobilisations, ou de barrages routiers, ou encore de l’occupation des bâtiments publics des municipalités.
La principale fédération syndicale de la CTM, la Fe.Si.Mu.Bo de Buenos Aires, a encouragé la tactique consistant à concentrer les forces de mobilisation et de pression sur les municipalités qui manifestent le plus de résistance à l’encontre de la négociation collective ; il s’agit généralement d’organiser des réunions régionales plénières avec les secrétaires généraux des syndicats locaux, et de concentrer dans la commune choisie un nombre important de militant(e)s et d’activistes syndicaux pour soutenir les employé(e)s municipaux locaux. Chaque action locale bénéficie de l’aide matérielle et symbolique du collectif syndical municipal de la province, dans le but de modifier les rapports de force sociaux et politiques généralement favorables aux maires.
La CTM dénonce de graves cas de répression à l’encontre des employé(e)s et des syndicats municipaux mobilisés pour défendre la loi paritaire. Par exemple, elle signale que le 25 novembre 2016, le maire d’Avellaneda (Buenos Aires), l’ingénieur Jorge Ferraresi, a ordonné à la police de réprimer une manifestation des employé(e)s municipaux du Sindicato de Trabajadores Municipales de Avellaneda (S.T.M.A.), un syndicat local affilié à la CTM ; huit travailleurs ont été blessés par des balles en caoutchouc tirées par la police.
Représentant(e)s et militant(e)s de la CTM et du Sindicato de Trabajadores Municipales de Avellaneda (S.T.M.A.) manifestant devant la municipalité d’Avellaneda (Buenos Aires) pour protester contre la répression. |
Dans de nombreuses collectivités, il n’y a toujours pas eu d’accord sur les hausses de salaire.
« Les maires disent qu’ils n’ont pas d’argent et qu’ils doivent en demander à la province, et la province dit qu’elle doit se tourner vers la nation, et en attendant les employés municipaux sont toujours le dernier maillon de la chaîne et les moins bien payés », a indiqué García. Certains maires ont proposé unilatéralement une prime de fin d’année, ce que la CTM considère comme un « palliatif ». « Nous ne demandons pas de prime, nous demandons une recomposition des salaires et l’application de la loi paritaire », a précisé García.
Rubén García, Secrétaire général de la Fe.Si.Mu.Bo et de la CTM ; Daniel Ferro, Coordinateur du Comité directeur de la CTM ; Gustavo Seva, Secrétaire des statistiques, de la formation professionnelle et du perfectionnement de la Fe.Si.Mu.Bo., lors de la mobilisation d’août 2016. |
Pour l’instant en 2017, les politiques d’ajustement ont été renforcées, le gouvernement national de Mauricio Macri cherche à aligner les provinces et les municipalités sur une structure salariale annuelle qui se base sur les prévisions officielles de l’inflation annuelle, sans tenir compte de la perte de salaire réel du secteur public aux niveaux national, provincial et municipal, qui s’est produite en 2016. Dans ce contexte, les négociations salariales du secteur municipal se sont généralement traduites en 2017 par une nouvelle baisse du salaire réel, bien qu’il existe des différences très marquées localement, parmi lesquelles une légère amélioration du salaire municipal, ou une baisse limitée du salaire municipal, sans que cela représente une tendance générale.
D’après la CTM, quel que soit le résultat des prochaines élections législatives, le gouvernement de Macri a l’intention de passer à la deuxième phase de l’ajustement. La première phase était centrée sur le transfert de revenus exceptionnels aux prestataires de services publics, par le biais d’une hausse des tarifs plusieurs fois supérieure à l’inflation annuelle et du lancement d’un nouveau cycle d’endettement extérieur. La deuxième phase sera axée sur l’ajustement des comptes fiscaux et ira directement au cœur des transferts destinés aux provinces et aux municipalités, c’est-à-dire les administrations publiques qui soutiennent et gèrent les services de santé, d’éducation, de sécurité urbaine, etc., ce qui portera atteinte à la notion de services publics de qualité fondée sur le principe de la qualité des conditions de travail des employé(e)s municipaux.
Les travailleurs/euses de la CTM continuent de se mobiliser pour revendiquer l’application totale de la loi paritaire et lutter pour le respect du droit du travail fondamental que représente la négociation collective des travailleurs/euses publics et des employé(e)s des collectivités locales et régionales/municipales d’Argentine. Cette question fera l’objet d’un débat public organisé par l’ISP dans le cadre de la prochaine Conférence internationale du travail qui se tiendra à l'Organisation internationale du travail (OIT) le mardi 6 juin 2017 de 13h00 à 14h00.
Article préparé en collaboration avec la CTM.