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"Les gens perdent confiance dans les services publics"

31 Mai 2018
En marge de la Conférence internationale du travail, l’ISP a rencontré des syndicalistes du monde entier, qui luttent pour défendre les droits les plus fondamentaux des travailleurs. Nathan Bangah Yengding, Secrétaire général de la Fédération des services publics du Tchad, décrit la situation dans son pays.

Au Tchad, les travailleurs sont de nouveau en grève pour protester contre les réductions de salaire unilatérales dans l’ensemble des services publics. Une des raisons principales de la crise actuelle est liée à un prêt suspect de plusieurs milliards de dollars accordé par la multinationale suisse Glencore, avec le soutien de l’argent du pétrole.

L’ISP s’est entretenue avec Nathan Bangah Yengding, le Secrétaire général de la Fédération des services publics du Tchad, pour en savoir plus.

Comment décririez-vous la situation actuelle au Tchad ? Y a-t-il eu des progrès depuis la dernière CIT ?

En ce moment, je dois dire qu’il n’y a pas beaucoup de progrès. En janvier, le Président a baissé unilatéralement les salaires des employés de la fonction publique dans l’ensemble du pays. C’est pourquoi nous avons été en grève pendant deux mois. Le 14 mars, les syndicats ont conclu un accord avec le Président et, conscients de la gravité de la crise financière de notre pays, ils ont accepté les réductions de salaire, le Président ayant personnellement garanti de rétablir les salaires initiaux à partir de juillet. Malheureusement, la semaine dernière, il est revenu sur sa décision et, maintenant, il dit que les fonctionnaires ne percevront leur salaire d’origine qu’en décembre. Cette annonce a provoqué une considérable perte de confiance et, pour cette raison, nous nous sommes de nouveau mis en grève.

D’après vous, quel est le rôle de Glencore dans cette crise ?

Le prêt de Glencore n’est pas dans l’intérêt de la population. Nous ne savons pas où l’argent est allé et nous avons été surpris d’apprendre l’existence de ce prêt, qui est loin d’être transparent. En ce qui concerne les prêts du FMI, par exemple, malgré les problèmes qu’ils posent, il y a au moins un certain degré de transparence. Mais avec Glencore, ce n’est pas le cas et nous, les citoyens tchadiens, nous ne savons rien des tenants et des aboutissants de cette affaire.

Vous avez récemment été élu représentant syndical au sein de l’organisation internationale Initiative pour la transparence dans les industries extractives. Que pensez-vous de l’importance de défendre la transparence pour les travailleurs ?

Grâce à l’ISP, nous avons réussi à nouer des liens avec les organisations de la société civile qui nous soutiennent dans notre rôle de travailleurs. SwissAid a fait venir ses experts au Tchad et ils ont commencé à enquêter sur certaines pratiques financières contestables, aussi bien dans le secteur public que privé. La transparence est importante parce qu’elle nous aide à voir à qui ces pratiques financières profitent vraiment. Elle nous permet également de révéler au public l’état réel des finances de notre pays.

Les employés de la fonction publique peuvent contribuer à ce combat pour la transparence et veiller à ce que le gouvernement agisse dans l’intérêt public. Nous sommes au premier plan de la lutte pour des services publics de qualité. Nous ne pouvons pas faire partie du problème, car nous devons être les premiers à tirer la sonnette d’alarme.

Cela dit, la position des lanceurs d’alerte est très délicate – les risques sont bien réels. Mais certains collègues ont le courage de communiquer des informations et, en tant que syndicat, nous avons le pouvoir de les diffuser ou de les transmettre à des partenaires.

Voyez-vous une issue au blocage actuel ?

Nous ne demandons pas grand-chose ! Nous ne demandons pas d’augmentation de salaire. Nous savons que la situation est difficile, mais ce que nous voulons avant tout, c’est retrouver nos salaires. Malheureusement, à l’heure actuelle les gens perdent la foi dans les services publics – nous ne sommes plus estimés en tant que travailleurs. De nombreuses personnes quittent le pays pour trouver du travail ailleurs. Il faut que cela cesse. Nous sommes disposés à travailler avec le gouvernement, s’il est disposé à respecter un niveau minimum de confiance.

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